Tark, shperlack, burfip, and other alien bad words : Investigating a sound-meaning association in English and French swear words
Tark, shperlack, burfip, et autres gros mots aliens : étude d'une association son-sens dans les gros mots de l'anglais et du français
- Gros mots
- Phonosymbolisme
- Tabou
- Double articulation
- Iconicité
- Arbitraire
- Français (langue)
- Anglais (langue)
- Son -- Aspect symbolique
- Swear words
- Sound symbolism
- Taboo
- Phonosymbolism
- Double articulation
- Iconicity
- Langue : Anglais
- Discipline : Langues et littératures anglaises et anglo-saxonnes
- Identifiant : 2024ULILH061
- Type de thèse : Doctorat
- Date de soutenance : 13/12/2024
Résumé en langue originale
Les gros mots, aussi connus sous le nom de jurons, mots tabous, ou en anglais profanities, bad words, etc. sont des mots socialement interdits car considérés comme extrêmement impolis ou gravement insultants. Pourquoi les gros mots sont-ils interdits et pas d'autres mots ? Une partie de l'explication vient de leurs sens liés à des domaines sémantiques tabous, comme la religion, la sexualité, ou les déchets du corps humain (Bergen 2016a : 12-39) ; s'ensuit alors la question: pourquoi leurs (quasi-)synonymes ne sont-ils pas interdits, par exemple en anglais, pourquoi prick est-il un gros mot et pas penis (Ljung 2011 : viii), pourquoi shit est-il un gros mot et pas excrement ou stool (Bergen 2016a : 14-15) ? Certains font l'hypothèse (Hughes 2006: 343) ou proposent à partir de données empiriques (Yardy 2010 ; Bergen 2016a : 52-63 ; Lev-Ari & McKay 2022 ; Chiang & Schlatter, ms.) que les sons influencent quels mots sont interdits, car les gros mots ont tendance à contenir des phonèmes spécifiques. On peut l'expliquer par le phonosymbolisme, l'idée selon laquelle les sons peuvent être associés à des sens (Dingemanse et al. 2015; Haiman 2018: 118-119; Sidhu 2019), ou pour le dire autrement, que les sons peuvent être impliqués dans des associations forme-sens inconscientes, des constructions inconscientes au sens de la Grammaire des Constructions (Goldberg 2006). Dans cette thèse, nous passons en revue ce que dit la littérature scientifique sur les gros mots et le phonosymbolisme. Nous décrivons ensuite trois études empiriques sur l'anglais et le français : une étude sur les gros mots de l'anglais et du français, une sur les gros mots fictionnels de l'anglais et du français, et une sur des gros mots expérimentaux - nous avons demandé à des locuteurs et locutrices dont la langue première est l'anglais et le français d'inventer spontanément des mots aliens, c'est-à-dire de langues extraterrestres comme dans une œuvre de science-fiction. Nos résultats suggèrent l'existence d'une association son-sens entre le sens social et émotionnel des gros mots (Finkelstein 2018 : 311, 326) et les consonnes les moins sonores selon l'échelle de sonorité de Parker (2008): les occlusives (/p/, /t/, /k/, /b/, /d/, et /g/), les fricatives sourdes (/f/, /θ/, /s/, /ʃ/, et /h/), et les affriquées (/tʃ/ et /dʒ/). Nos données sur les gros mots français confirment également qu'ils ont un sens plus social et émotionnel, comme “intrusion dans l'espace personnel de l'interlocuteur ou interlocutrice”, ou “rupture du tabou”. Enfin, nous offrons une discussion théorique de ce que notre association son-sens et d'autres impliquent pour la façon dont la langue transmet du sens. En particulier, nous proposons que, bien qu'il s'agit d'un débat polémique, les principes classiques que sont la double articulation (Dingemanse et al. 2015 ; Martinet 1957) et l'arbitraire du signe (Saussure (2005 [1916]) ne sont en réalité pas incompatible avec le phonosymbolisme. Une réanalyse de la double articulation de Martinet et l'arbitraire de Saussure suggère que ce dernier devrait être redéfini plus spécifiquement qu'originellement conçu par Saussure, et que l'arbitraire n'implique pas logiquement la double articulation. Cette réévaluation permet également de distinguer entre les associations son-sens motivées et non-motivées. Elle nous aide à mieux comprendre comment les locuteurs et locutrices peuvent donner sens aux sons, autrement dit, comment les sons peuvent être impliqués dans des associations sons-sens inconscientes qui influencent profondément la langue - comme dans le cas de l'interdiction des gros mots - et ne sont pas limitées à la poésie et autres jeux de langage.
Résumé traduit
Swear words, also known as taboo words, profanities, bad words, etc. are words that are socially forbidden because they are considered extremely impolite or gravely insulting. Why are swear words forbidden and not other words? Part of the explanation is that they have meanings related to taboo semantic domains, like religion, sexuality, or body waste (Bergen 2016a: 12-39); but then the next question is: why are their (near-)synonyms not forbidden, e.g., in English, why is prick a swear word and not penis (Ljung 2011: viii), why is shit a swear word and not excrement or stool (Bergen 2016a: 14-15)? Some researchers hypothesise (Hughes 2006: 343) or propose based on empirical data (Yardy 2010; Bergen 2016a : 52-63; Lev-Ari & McKay 2022; Chiang & Schlatter, ms.) that sounds influence which words are forbidden, because swear words tend to contain some specific phonemes. We can explain this in terms of sound symbolism, the notion that sounds can be associated with meanings (Dingemanse et al. 2015; Haiman 2018: 118-119; Sidhu 2019), or to put it differently, that sounds can be involved in unconscious form-meaning pairings, unconscious constructions in the sense of Construction Grammar (Goldberg 2006). In this thesis, we review what the literature says on swear words and sound symbolism. We then describe three empirical studies conducted on English and French: one study on swear words of English and French, one on fictional swear words in the same two languages, and one on experimental swear words - we asked native speakers of English and French to spontaneously invent words from alien, i.e., extra-terresterial languages as in science-fiction works. Our results suggest the existence of a sound-meaning association between the social and emotional meaning of swear words (Finkelstein 2018: 311, 326) and the least sonorous consonants according to Parker's (2008) sonority scale: plosives (/p/, /t/, /k/, /b/, /d/, and /g/), voiceless fricatives (/f/, /θ/, /s/, /ʃ/, and /h/), and affricates (/tʃ/ and /dʒ/). Our data on French swear words also confirm that they have a more the social and emotional meaning, like “violation of hearer's space” or “taboo-breaking”. Finally, we offer a theoretical discussion of what our sound-meaning association and others mean for meaning-making in language. In particular, we propose that even though it is a polemic debate, the classical tenets of linguistics of double articulation (Dingemanse et al. 2015; Martinet 1957) and arbitrariness (Saussure (2005 [1916]) are actually not incompatible with sound symbolism. A reanalysis of Martinet's double articulation and Saussure's arbitrariness suggests that the latter should be redefined more specifically than originally conceived by Saussure, and that arbitrariness thus does not entail double articulation. This reassessment also allows to distinguish between motivated and non-motivated sound-meaning associations. It helps us better understand how speakers can give meaning to sounds, i.e., how sounds can be involved in unconscious sound-meaning pairings that influence language deeply - like the interdiction of swear words - and are not just limited to poetry and other language games.
- Directeur(s) de thèse : Lemmens, Maarten - Mairano, Paolo
- Président de jury : Przewozny, Anne
- Membre(s) de jury : Bergen, Benjamin K. - Flaksman, Maria - Ponsonnet, Maïa
- Rapporteur(s) : Przewozny, Anne - Jamet, Denis
- Laboratoire : Savoirs, textes, langage (Villeneuve d'Ascq, Nord)
- École doctorale : École doctorale Sciences de l'homme et de la société
AUTEUR
- Vallery, Robin